18 février 2024
Art de rue
Comme la plupart de nos grandes cités Marseille offre le spectacle d’une ville aux murs souvent entièrement recouverts de « tags » dont le non-sens basique (ceci est mon blaze, ma signature, c est moi qui ai fait ça) me désole toujours autant surtout quand ces expressions purement dénominatives ne se soucient pas du support, se posent n’importe où sans respect d’aucun lieu, se superposent sans vergogne, s’additionnent pour finalement s’annuler, bref : salopent et souillent nos paysages urbains.
Cette calamité visuelle ne doit évidemment pas être associée aux « peintures murales », fresques bombées en tous genres, qui envahissent elles aussi de nombreux pans de murs dans l’espace public mais avec des qualités graphiques, picturales, inventives, qui font de la rue un musée pour tous, à ciel ouvert, gratuit, réjouissant d’imagination et de variété. Ces productions justifient le terme de « street-art » qui constitue sans contestation une branche nouvelle des arts visuels. Cet art a déjà son histoire, ses maîtres (de Pignon-Ernest à Banksy…), ses classiques, ses variations internationales.
À Marseille le quartier du Panier par exemple est désormais un haut-lieu pour ces œuvres de rue avec lesquelles j’ai composé ici même à plusieurs reprises de petits reportages photographiques.
Et puis il y a le graffiti textuel. Le mur devient alors support d’un texte bref et si possible frappant qui devrait interpeller le passant ou la passante, le détourner un bref instant de son urbanité pour un moment de poésie, de philosophie, d’humour. J’ai évidemment, vous vous en doutez, un jugement très différent sur ces graffitis signifiants que sur les tags insignifiants et bouffons.
Grande prêtresse de ce genre de littérature de rue, « Miss Tic » est pour moi une artiste majeure qui a su concilier esthétique, poésie, humour, et engagement. Gloire à elle ! Et à ses disciples qui, au pochoir ou à l’arrache, distillent dans les coins de nos villes mortifères des appels à se réveiller de notre torpeur, à sortir de nos chemins tout tracés, à sourire ou réfléchir (ou les deux)… Les exemples de « mai 68 » constituent bien sûr en ce domaine un ensemble inégalable mais toujours très inspirant.
Ainsi en est-il de ce graffiti découvert récemment dans le quartier Saint-Charles et que j’ai plaisir à diffuser ici.
Rien d’artistique dans la réalisation mais un beau sens de la « formule » et une mystérieuse signature visuelle ésotérique qui suffisent à me le rendre sympathique.
Ça tombe bien parce que je réfléchis depuis des années à projeter aussi dans l’espace public, rues routes murs sols, mes propres poèmes minuscules ou des formules brèves sur lesquelles je travaille actuellement.
Ce genre de graffiti, intelligent, poétique, militant, très proprement et clairement exposé sur un mur (en béton) disponible, ne peut que m’inciter à creuser la question. Mon « Ive project » ne fait peut-être que commencer. A suivre…
Ive Gerbal, 17 février 2024 l
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