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05 juillet 2024

De la politique. 4

De la politique
Partie 4.
Liberté chérie.
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C'est donc acquis : le capitalisme aime la démocratie, la démocratie aime le capitalisme. Doit-on pour autant aimer le capitalisme ?
Nous l'avons dit précédemment, le capitalisme rassemble une communauté autour d'un même but : le gain d'argent. Multipliant à l'infini les transactions commerciales, transformant toute chose, situation, lieu, être, en produit potentiel, il prouve chaque jour son implacable efficacité, et se nourrit même de ses crises.
Tout en rassemblant autour d'un centre commun (l'argent) il valorise "l'individu" et se targue de défendre ses libertés. Les particularités individuelles se combinent très bien avec le conformisme idéologique du groupe. L'individualisme devenu la marque de fabrique de nos sociétés modernes évite un éventuel mouvement d'ensemble voire universel qui viendrait ébranler par sa force collective les fondations du capitalisme. Imaginez une désertion généralisée, une grève mondiale, un rejet planétaire...
Par ailleurs, après avoir longtemps privilégié les grands groupes par des systèmes associant "modes" et "marketing", le capitalisme a désormais fait de chaque individu une cible à part entière avec la numérisation universelle de l'existence. Ivre de sa supposée liberté, l'individu baisse la garde, se croit à l'abri de la pieuvre économique, et commande un produit sur internet tout en "surfant" (la belle image !) sur des réseaux sociaux où règnent désormais les algorithmes. La cible n'a jamais été aussi précise. Coup de génie du capitalisme qui après s'être rendu maître des foules en les attirant dans les supermarchés ou les spectacles, en les faisant travailler pour acheter des produits dont elles n'ont pas besoin ni fondamentalement envie, se rend désormais maître de l'individu en établissant une liaison directe avec son cerveau rendu totalement "disponible" pour le discours publicitaire...
 
 


Et pendant ce temps que fait l'Etat ? Que disent les politiques ? Ils n'osent avouer leur impuissance devant les méga entreprises qui ont plus de pouvoir que lui. Ils n'osent avouer leur impuissance devant une société totalement dominée par les discours du capitalisme, façonnée par son idéologie, et dont chaque membre, dès l'enfance, est nourri. Ils n'osent avouer leur totale dépendance (voire addiction) à des médias qui font l'opinion, y compris dans les versions les plus médiocres ou les plus dangereuses pour la collectivité. Ils sont à la traine. Ils sont au service. Ils sont serviles. Ils sont condamnés. Au mieux la politique est devenue un feuilleton parmi d'autres dans la "société du spectacle". Au pire, l'individu consommateur et spectateur s'en détourne totalement, signant par son abstention récurrente aux élections la fin d'une démocratie véritable au profit d'une opinion individualisée, morcelée, fragmentée, exacerbée, excitée, mais toujours sous contrôle.
Sous contrôle... L'expression, je le sais, va me valoir un procès en sorcellerie complotiste. Tout est recyclé en société capitaliste, et le langage est bien sûr un enjeu capital. Lucidité, clairvoyance, analyse, doivent être tenus à l'écart.
Si Platon aujourd'hui exposait son allégorie de la caverne, nul doute qu'il serait taxé de "complotiste". Relisez ce classique pour y voir comment le philosophe dénonce les ombres que l'on met devant les yeux des hommes pour qu'ils ne soient pas tentés de trouver par eux-mêmes la sortie vers la lumière du soleil et la vérité de leur condition.
Ce ne sont pas les politiques qui agitent les marionnettes dont les ombres chinoises dansent sur les murs de la caverne. Ils sont eux-mêmes enchainés par terre, tournant le dos au feu. Parfois cependant, s'ils sont sages, les marionnettistes leur prêtent leurs jouets, et c'est assez pour motiver leur course à un pouvoir qui n'en est plus un mais qui en garde les fastes et les costumes (avec cravates).
L'Etat est donc impuissant. Le capitalisme l'a tué. Logique. Il ne peut pas y avoir deux patrons. Les démocraties modernes sont en fait des "monarchies capitalistes". "Moins d'Etat" a toujours été le leit-motiv des "libéraux", jouant encore une fois sur la promesse grisante de la liberté individuelle. Moins d'Etat, plus de "privé". Ayons confiance ! Confions à des entreprises ce que l'Etat pourrait faire, et surtout dans les domaines les plus vitaux : l'alimentation, la santé, la production et la distribution d'énergie, les transports, l'éducation... L'eau aujourd'hui. L'air demain. Les terres aujourd'hui. L'espace demain.
Bilan ? "Quand tout sera privé, vous serez privé de tout" comme je l'ai lu un jour en formidable graffiti sur un mur. Celui ou celle qui avait écrit ça n'était certainement pas un(e) marionnettiste de la caverne de Platon...
Voilà comment la promesse de liberté pour tous de ce "libéralisme" devient la liberté pour quelques-uns de s'approprier le monde et de diminuer les capacités d'existence du plus grand nombre.
Rappelez-vous l'argument premier en faveur de notre modernité technico-capitaliste : "Allongement de l'espérance de vie !". Mais de quelle vie on parle ? Ou plutôt : de la vie de qui ? Les vies se valent-elles toutes ? Le capitalisme a-t-il enfin répondu à la demande de "vie bonne" des philosophes de l'Antiquité ? Et la Planète qui a rendu cette vie possible, comment va-t-elle au fait ?
Allez. Admettons que j'exagère. Je suis allé trop loin. Je me suis laissé emporter. Je suis tombé dans la caricature. J'oublie tous les bienfaits de cette société de l'opulence dans laquelle je vis et dont je jouis dans ce système économico-politique que je dénonce. Ne suis-je pas la preuve, en vous écrivant ici même, que le capitalisme est bien le garant de ma liberté, et que je ne suis au fond qu'un enfant gâté qui joue au rebelle ? Ou plutôt : un vieux gâteux qui retombe en adolescence ?
(à suivre)
Yves Gerbal
23 juin 2024
 

mackinsey.jpgoh oh

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