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07 septembre 2024

La fatigue

Longtemps je l’ai passionnément observée. Aujourd’hui l’espèce humaine me fatigue profondément. Et comme j’appartiens à cette espèce, je me fatigue moi-même.
Que l’on soit deux ou des milliards, la paix n’est jamais durable. Et seul c’est pire encore…
Ce qui reste de nature et de chemins pour mes pas, la musique parfois, certaines caresses, la possible tendresse, peuvent sembler me distraire de cette fatalité essentielle : je suis un humain épuisé sur une planète en perdition. Comment trouver un peu de repos ?
Marcher. Courir. Partir. Étrangement, ce mouvement m’apaise. Tout le reste m’éreinte.
Mais je n’échappe à rien, je ne change rien, et même en prenant le large, même dans les marges, je traine avec moi cette lourde condition tout en continuant de chercher le sens de cette course éphémère, pleine de bruit et de fureur.
Ai-je vraiment besoin d’en faire des mots ? Cela aussi commence à me fatiguer.
Curieusement je reste néanmoins plein de gratitude pour le hasard et les mystères qui m’ont fait traverser une existence de terrien.
J’ai gouté à la grâce infinie de certains instants arrachés à l’essentielle vanité humaine.
La vie m’a offert son élémentaire beauté et les moyens de la saisir.
Devrais-je alors juger ma fatigue coupable ? Voilà encore un poids qui vient sur mes épaules.
Si la fuite est impossible et le détachement illusoire, peut-être pourrions-nous, au lieu de s’agiter en vain, avouer humblement et partager cette commune lassitude. Ce pourrait être le début d’une nouvelle fraternité.
« C’est ma dernière image de l’humanité : réconciliée en ses ultimes instants dans une fatigue cosmique » (Peter Handke, Essai sur la fatigue).
Yves Gerbal
5 septembre 2024

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