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23 juillet 2022

La leçon de théâtre de Philippe Caubère

On va au festival d’Avignon pour découvrir une pièce parmi des milliers. On va à Avignon sans vraiment savoir ce que l’on cherche et donc évidemment ce que l’on va
 trouver. On va à Avignon pour faire la part belle  à des petites compagnies, à des troupes en devenir, à des débuts de carrière.
Et puis au hasard d’une déambulation place de l’Horloge  on tombe par hasard sur une affiche parmi des milliers d’autres qui propose le spectacle de Philippe Caubère a partir de textes de Alphonse Daudet. On n’était pas venu pour ça. On n’était pas venu pour lui. Mais le hasard est aussi souvent un signe. Alors on fonce  à « La condition des Soies ». L’horaire est favorable. C est  une chance. On entre  à 19h30 dans cette salle demie circulaire à haute coupole. On a fait un peu des pieds et des mains pour se trouver au tout premier rang,  au plus près de cet acteur que l’on connaît bien, que l’on a si souvent vu seul en scène, depuis si longtemps. On craint  peut-être d’être déçu. Serait-ce la représentation de trop ? Une redite ? Va-t-on se lasser ? 
Ca commence. Caubere entre en scène avec pour simple appareil les mots de Daudet, quelques lumières, des bouts de musique, une mise élégante de dandy félibrige. Ça commence, et c’est magique. Si peu de choses : un comédien, un texte. Et tout ce que cela fait exister : paysages, personnages, lieux, objets, drames, comédies…
Une fois encore Philippe Caubere nous offre une leçon de théâtre. 
Il lui suffit d’un regard, d’un geste, d’une intonation, pour faire apparaître le marin corse, les naufragés de la Sémillante, la plaine de Camargue, les taureaux dans la tempête, un couple de vieux, un berger amoureux sous les étoiles…
Bien sûr tout cela c’est d’abord Daudet, auteur tellement injustement minoré, qui en a fait matière littéraire, mais Caubère donne à ces textes merveilleusement écrits un écrin qui les exalte, amplifie leur effet, et nous permet de les graver en nous. Il incarne par sa voix ensoleillée les moments de grâce de l’écrivain enivré par les  beautés du sud, par cette Provence qu’il contemple avec tous ses sens. 
C est donc un grand moment de pur bonheur théâtral que l’on peut vivre à la Condition des Soies.
On en ressort tout joyeux, souriant, gai et pimpant. Daudet a pourtant parcouru toute la palette de la comédie humaine, douleurs et tragédies. Mais savoir que l’on peut ainsi jouer la vie, aussi simplement, et mettre à distance un instant la dureté du monde sur une scène, cela ne nous sauve de rien mais nous offre une parenthèse enchantée. Peut-on espérer davantage dans notre époque trouble que cet éphémère enchantement? Alors ne vous  en privez surtout pas. Allez sous les étoiles de Provence avec Philippe Caubère retrouver la magie du théâtre éternel…
Yves Gerbal
« Les Étoiles et autres lettres », au théâtre La condition des soies. Festival d’Avignon, le Off.

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