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13 mars 2007

Vade retro Sarko !



 “ Tu vas tout de même pas voter pour Sarkozy ???!!! ”  m’assena-t-elle devant la machine à café, limite vindicative, voire menaçante... Tout ça parce que je venais de lui dire que la veille j’avais regardé Nicolas Sarkozy à la télé pendant près de 3 heures et que, prises les unes après les autres, je ne trouvais rien de fondamental à redire à ses propositions. Et que de plus, autant l’avouer, je l’avais franchement trouvé très bon à l’oral, notamment par rapport à une Ségolène ânonnante qui m’endort dès qu’elle parle... Bon, je sais, une présidentielle n’est pas un concours, mais il se trouve que j’aime bien les orateurs doués (mais bon, ça va, je suis lucide : Hitler aussi était très doué, et Staline aussi, comme Le Pen ou Bernard Tapie...). Bref, j’expliquais simplement que je ne m’étais pas du tout ennuyé, et que je reconnaissais à ce candidat une volonté de ne jamais éluder les questions. Houuuuuuuuuu là là... Que n’avais-je dit là  ? Le bûcher n’était pas loin. Je sentais déjà le roussi. Mon procès avait été vite expédié, comme il se doit en ce cas là. Qui me jugeait ainsi ? Une enseignante sans souci, plutôt du bon côté du manche, belle vie et gentil mari, consommatrice de culture et de belles choses, pas vraiment à la peine, et mère d’une charmante enfant scolarisée dans l’enseignement privé, évidemment... Cela ne lui enlevait pas le droit de me tancer, mais je crois que j’aurais mieux accepté un tel ton (pas thon du tout, elle...) de la part d’un quidam à la vie dure, je veux dire un peu plus dans la mouise socialement, qui aurait eu quelque raison de s’emporter avec vigueur sans chercher de démonstration au-delà de l’exclamation.

 


Bon, d’accord, puisque tu me le dis ainsi, je voterai pas Sarkozy. J’ai pas envie de finir comme une merguez, moi ! Mais cela dit, j’ai pas été loin de mal le prendre, comme chaque fois qu’on me dit ce que je dois faire, surtout en politique... J’aime pas trop quand on me fait la leçon de manière péremptoire. Je me braque vite, je l’avoue, quand on se contente comme argument de me présenter le diable du moment. Pendant des années la gauche n’a cessé de diaboliser l’extrême-droite. Bilan des courses : Le Pen a accédé au 2ème tour d’une élection présidentielle. Et depuis des mois qu’entends-je sur ma gauche ? La pensée réduite à un slogan : “Sarko-facho” ou “Tout sauf Sarkozy”.  C’est marrant ce besoin d’avoir toujours besoin d’un diable...  Qu’est-ce que ça révèle ?  Le besoin de pouvoir asseoir sa pensée sur un rejet, un refus ? Le besoin de savoir localiser le “mal”, pour être sûr d’être du côté du “bien” ? Au fond , là-dessous, il y a peut-être un profond besoin de se rassurer. La plupart n’ont ni dieu ni maître (ce que je comprends très bien...), mais il leur faut un diable... Le besoin d’une référence, d’un point fixe, d’un ancrage. Là, au moins, ils savent à quoi s’en tenir. De cela, au moins, ils en sont sûrs. Car il faut bien être sûr de quelque chose, non ? Sinon, où va-t-on ? A ce titre, Le Pen a donc été bien utile. Il a pendant des années servi de repoussoir, de critère d’évaluation. Au lieu de gesticuler et de faire l’ange il aurait peut-être fallu plus souvent écouter ceux qui votaient pour lui et ne pas se contenter d’un “Tu vas tout de même pas voter Le Pen ???!!!” idéal pour donner l’impression à l’électeur qu’il n’est plus libre, qu’il n’a pas le droit à son jugement, qu’il doit s’en réferer à une élite de la pensée détentrice de la vérité ...  Peut-être valait-il mieux démonter calmement son “programme” point par point. Au lieu de dire “nauséabond” (ah, le courage de ceux qui préconisaient de voter Chirac en 2002 avec une épingle à linge sur le nez ...) il aurait fallu dire “nul”, ce qui n’était pas très difficile à prouver. Fallait-il discuter de ses opinions ? Oui, et de toute façon nous n’avions pas le choix. Ca s’appelle la démocratie, que ça nous plaise ou non. En tout cas, une chose est sûre, le “problème” de l’extrême-droite est loin d’être réglé. C’est l’extrême-droite qui a fait gagner le fameux camp du “non” au référendum sur la Constitution Européenne, et les présidentielles n’annoncent apparemment aucun recul, malgré  tous les anathèmes possibles... alors que la bande à Bové risque de cruellement déchanter quand le temps du vote sera venu...

Alors, voilà, on se remet donc à crier au loup ! Cette fois c’est un immigré qui trinque (“Sarkozy” je trouve que ça fait pas vraiment “français de souche”, vous trouvez pas ?). Ce que j’entends presque exclusivement autour de moi comme arguments, c’est, bien sûr, qu’il est de droite. Mais honnêtement ça ne suffit plus à me convaincre (Fabius est bien de gauche, par exemple : ça ne suffit pas non plus à me convaincre...). J’ai besoin d’autre chose. Qu’est-ce qu’on me dit, en fait, la plupart du temps ? Que ce type est “inquiétant”, qu’il “fait peur”, qu’il est “dangereux” (1) ... Bon, d’accord. Mais à part ça ? Il dit quoi ? Des grosses bêtises ? Des trucs insupportables ? Son programme est nul ? Ou alors faut-il ne pas se fier aux programmes, et dans ce cas là, autant dire aussi qu’on peut voter Royal parce qu’elle a de belles jambes...

 On me parle aussi de la face cachée de Sarko, et j’ai lu là-dessus une excellente BD, aux éditions Vents d’Ouest. Voilà qui est déjà beaucoup plus convaincant, même si malheureusement on est encore dans le registre de la caricature. Je ne me réfère pas  aux Guignols en tous genres pour penser la politique. Leur rôle est ailleurs. Donc, dont acte, le passé de Sarkozy ne plaide pas pour lui. Ni, surtout, ses accointances médiatiques, notamment avec TF1 (que Bayrou fait bien de dénoncer !). Mais les autres, ils n’ont pas de face cachée ? Et Mitterrand, il n’avait pas de faces cachées ? Quant à son obsession du pouvoir, je ne la trouve pas très différente de celle, là encore, d’un Mitterrand ou d’un Chichi... Ca fait peur ? Peut-être. Mais au moins a-t-il toujours eu la sincérité de ne pas cacher son ambition, là où beaucoup minaudent pendant des années,  manient  à l’envie la langue de bois, pour finalement se la jouer altruiste : “Si on me réclame, si on m’aime, je veux bien essayer...”  (le syndrôme Jospin). Rien de plus normal que d’en avoir très envie, sinon on ne s’engage pas dans cette conquête du pouvoir telle qu’elle est organisée dans notre démocratie. Ou bien on refuse, ce que fit Delors, très fort... (et dont la filiation politique est probablement chez Bayrou... dont je reparlerai bientôt...).

Mais bref, ne tergiversons pas : c’est le diable en personne... Comme je suis gentil et très influençable, moi aussi je finis par avoir peur... Alors d’accord, puisque vous me le dites, chers amis à ma gauche, gauche toujours bien pensante, gauche souvent caviardeuse et luberoneuse, gauche de Jack Lang et de Pierre Berger, sainte gauche qui prie toujours pour nous, gauche qui a le monopole du coeur et des bons sentiments, gauche plus ou moins éléphantesque, gauche plus ou moins libertaire, gauche plus ou moins altermondialiste,  gauche enseignante, gauche, ô ma gauche, j’écoute ta sainte voix et je me prosterne devant toi : c’est promis, je ne voterai pas Sarkozy !

Et puis il y a aussi une autre raison...  Vous voulez vraiment savoir laquelle ? Vous insistez ? Alors je vous le dis : c’est parce qu’il est petit. Il faut toujours se méfier des petits : ils ont une revanche à prendre sur la vie. Rappelez-vous Robespierre ! Rappelez-vous Napoléon ! Alors moi, on ne me la fait pas : maintenant j’ai compris, je dis : gare au petit ! Oui, je vous le dis, méfiez-vous : il est petit, il est malin... Bon, cela dit, un grand, c’est pas toujours terrible non plus : regardez Chichi... Et puis il y a des contre-exemples : “Kirikou est petit, mais c’est mon ami” (2)... Et de Sarko on pourrait dire comme de Kirikou qu’il “n’est pas grand, mais il est vaillant” ... En fait, quelle est la bonne taille pour être Président(e) ? Coluche, qui a failli se présenter aux élections, disait : "La bonne longueur de jambes, c'est quand les pieds touchent par terre". Sarkozy, en tout cas, on peut lui reprocher tout ce qu’on veut, mais il a bien les pieds sur terre...

Commentaires

Cher Yves, merci, j'ai avalé mon café de traviole autour d'une sus-dite machine, aux côtés d'une certaine collègue orfraie qui faillit me régurgiter le sien à la face en s'écriant: "Tu vas tout de même pas voter pour Sarkozy ???!!!" tout ça parce que je venais de lui dire que la veille j’avais regardé, etc. :)
Pffff déjà que j'ai plus l'droit d'fumer, les pauses-café deviennent sinistrées...

Écrit par : Slankamusée | 13 mars 2007

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